Les bonnes résolutions du Grand Maître de la Cause
Vous tous qui êtes en train de préparer le réveillon du Nouvel An, qui vous agglutinez dans les allées froides et suréclairées des supermarchés, qui cherchez votre service de mariage pour bien accueillir vos convives, qui descendez à la cave pour retrouver la boite à confettis et à cotillons, vous n’imaginez pas à quel point je vous plains.
Je ne vous plains pas en raison de votre participation à ces festivités de fin d’année, car moi aussi je suis un homme comme un autre, malgré mes apparences d’exception, j’ai des amis et je vais devoir passer une soirée morbide en leur compagnie, car le réveillon est toujours une soirée pénible. Un couple d’amis se dispute et il faut consoler l’un et l’autre en donnant à chacun l’assurance qu’on est de son côté; un type qui se retrouve là car c’est l’ami de l’amie d’un ami ne cesse de boire et vous vous retrouvez à 23h à le passer sous la douche ou à essuyer ses déjections orales dans les toilettes; à minuit, tout le monde explose de joie puis, une minute plus tard, fait le point sur sa vie, et déprime; à une heure du mat’, les derniers vaillants font comme si de rien n’était et continuent de se trémousser sur une pauvre musique des années 80 avant de tomber, raide de fatigue, un quart d’heure plus tard, parce que c’est pas tout ça, mais demain, y en a qui bossent.
Tout cela, à une bulle de champagne près, vous l’avez vécu, vous le vivrez à nouveau, et moi non plus, je n’y couperai pas. Ce n’est donc pas de cela que je vous plaindrais ici, nous sommes tous dans la même barque et je préfère encore m’apitoyer sur mon propre sort. En revanche, ce dont je vous plains grandement, c’est de la rituelle question à laquelle vous devrez obligatoirement faire face sur les coups de minuit : « Alors, quelle est ta bonne résolution pour l’année à venir ? »